Le contexte
Depuis quelques temps, la tendance mondiale est au tout électrique.
Avec la récente règlementation qui interdira aux constructeurs automobiles la vente de véhicules thermiques neufs dès 2035, les constructeurs automobiles se sont activés pour concevoir des véhicules adaptés à l’usage de chacun.
Et les ventes de 100% électriques n’ont cessé d’augmenter, le parc automobile actuel présente un nombre de ce type de véhicule record.
Ce bond en avant est principalement dû au fait que les progrès technologiques ont permis la mise en place de véhicule présentant des capacités se rapprochant des automobiles thermiques traditionnelles.
Que ce soit en termes d’autonomie, de performances et de mise à disposition sur le réseau routier de stations de recharge, l’utilisation au quotidien d’un véhicule électrique répond aisément aux exigences de l’usager.
La tendance du tout électrique devrait donc logiquement s’étendre aux autres machines qu’elles soient maritimes ou aériennes, et tout comme dans le secteur routier, l’usager adoptera le tout électriques à condition qu’il réponde à ses exigences…et malheureusement c’est loin d’être le cas.
Un déficit de performances, une sécurité compliquée.
Les avions électriques sont aujourd’hui très rares, et seuls quelques petits constructeurs proposent des appareils qui sont d’avantage des ULM que de véritables avions.
Présentant des autonomies ultra faible (rarement au-delà de 45 minutes de vol effectif !), des vitesses de 80 Kts, des cabines réduites à 2 places, des emports de charge très limitatifs, les avions électriques ne répondent toujours pas aux exigences de l’usager, qu’il soit privé ou professionnel.
Le réseau de recharge est strictement inexistant. Il n’existe pas non plus de système de super-recharge, et après quelques dizaines de minutes de vol, il faut s’armer de patience pendant de nombreuses heures pour recharger son avion.
De plus, le module de recharge est encombrant et lourd, il n’est pas possible de l’embarquer afin de recharger ailleurs…si toutefois on arrive à trouver une prise, ce qui n’est jamais le cas.
L’avion électrique est donc aujourd’hui plus proche d’un prototype aux allures de mirage écologique qu’une solution.
On peut alors se poser la question de ses avantages.
En termes de pollution, c’est indéniable, l’électrique ne pollue pas (à l’utilisation, à la fabrication et au recyclage c’est une autre histoire à laquelle le secteur automobile n’a d’ailleurs toujours pas de réponse, malgré son expansion…).
Et en termes de nuisance ? Une fois de plus, malheureusement les attentes ne sont pas au rendez-vous.
Un avion fait du bruit à cause de sa mécanique mais également et particulièrement à cause de ses « bruits aérodynamiques ». L’écoulement à forte vitesse sur la cellule génère tout de même un bruit très important.
A haute altitude (ce qu’en plus un avion électrique ne peut atteindre), le bruit de la mécanique thermique à haut régime est très peu perceptible, et lorsque les avions se rapprochent du sol, c’est pour atterrir, et leur régime est quasiment au ralenti, réduisant considérablement le bruit de la mécanique thermique.
Les avions thermiques et électriques font donc « quasiment » le même bruit lorsqu’ils se rapprochent du plancher des vaches, ils génèrent tous deux un bruit aérodynamique.
La règlementation applicable aujourd’hui exige des réserves de carburant (PART-NCO par exemple) permettant de palier à des imprévus en vol. Un terrain non accessible, une météo se dégradant, et c’est le déroutement. Il faut donc disposer à bord de réserves de carburant suffisantes pour pouvoir rejoindre un autre aérodrome…
Quid de l’avion électrique avec ses 45 minutes de vol ? Le vol en navigation n’est pas possible, seul le vol local autour de l’aérodrome (et encore, il nécessite deux pistes distinctes, ou un autre aérodrome tout proche, à moins de quelques minutes de vol…) est envisageable.
Donc à part faire des ronds dans le ciel, en espérant qu’il n’y ai pas trop d’imprévus, l’avion électrique n’offre pas de vastes possibilités, et est très très loin des capacités d’un véritable avion.
Cout, Exploitation et entretien.
Analysons désormais les différents couts.
Si l’avion électrique comme vu précédemment présente de très nombreux inconvénients et ne peut absolument pas concurrencer l’avion traditionnel, on ose espérer que son tarif soit attractif.
Et bien non, encore raté.
Les tarifs sont au même niveau (voir supérieur) aux tarifs d’une machine thermique de même classe.
Sauf que les capacités ne sont pas du tout les mêmes ! Le tarif devient carrément prohibitif lorsqu’on s’attarde au rapport performance/cout.
A l’exploitation, en revanche, l’avion électrique s’affranchit de dépenses en AVGAS, ce qui peut présenter une belle économie.
L’entretien par contre n’est pas aussi facilité. Les mécaniciens et ateliers « avion électrique » n’existent purement et simplement pas. Seuls les rares constructeurs sont en charges de ces tâches. Exit donc la possibilité de rapidement faire intervenir un mécanicien pour palier à des petits soucis…
Exit également l’intervention sur terrain extérieur à l’aérodrome de départ (Qui de toute façon est inaccessible !!)
Et malgré sa théorique fiabilité (on est loin de la fiabilité d’une automobile toutefois…), les visites périodiques si couteuses sur une machine thermique existent aussi sur les appareils électriques.
On se retrouve donc avec des couts d’exploitation proche d’un thermique, mais avec des difficultés évidentes supplémentaires, et donc un tarif à la location (pour le peu que ça existe…) identique ! Ce qui fait quand même un peu cher pour un avion télécommandé dans lequel on peut s’installer…
Intérêt pour le pilote et l’élève
Attardons-nous désormais sur la pédagogie et l’intérêt pour le pilote privé et pilote professionnel en devenir.
Certaines écoles ont fait le choix de proposer une partie de formation initiale sur des avions électriques. Outre les nombreux défauts déjà évoqués, l’attractivité d’une dépense nulle en carburant et la belle image « développement durable » affiché ont donc convaincu ces exploitants, au détriment de notions pédagogiques et d’intérêt réel pour le futur pilote.
L’obtention d’une licence PPL passe par la conduite et la gestion d’un moteur thermique.
Le PPL est systématiquement associé à l’obtention d’une qualification de classe SEP (Single Engine Piston) et par des navigations obligatoires (notamment de 150NM).
Ce que l’avion électrique ne permet pas.
Les minimas légaux d’obtention du PPL sont de 45H (dont 25H en double, et au moins 10H en solo), et il est déjà compliquée d’amener l’élève au niveau en ce laps de temps, lorsqu’il vole sur le même appareil.
Lui apprendre la conduite d’un avion spécifique les premières heures, puis lui réapprendre une autre conduite totalement différente et bien plus exigeante après (gestion carburateur, gestion carburant, gestion mécanique – température pression etc..-, essais moteur, magnétos…) est très compliquée, voir impossible.
Le jeune pilote privé une fois breveté (avec assurément un nombre d’heure plus important, et donc un cout encore plus élevé) va donc devenir membre d’un aéroclub pour louer ses avions. Et il ne trouvera pas d’avions électriques.
Et son expérience sur avion traditionnel aura été tronquée par ses heures électriques, ce qui garantit des compléments d’heures en double commande pour être lâché…
Le jeune pilote professionnel aura le même problème. L’intérêt d’une formation professionnelle est de préparer le stagiaire à son futur métier.
En phase de murissement par exemple, il doit agir comme un véritable commandant de bord et voler en autonomie afin de parfaire son expérience.
Pour optimiser cette phase, il est très important qu’il navigue vers des horizons inconnus.
Ce que l’avion électrique ne permet pas.
(Encore une fois, si jamais il trouve un avion électrique à louer…).
Et ces précédentes phases de formation en électrique ne l’auront pas formé à la gestion d’une machine qu’il rencontrera plus tard. On constate donc que l’intérêt pédagogique est inexistant ! Voir handicapant.
L’avenir et la conclusion
Malheureusement l’avion électrique est une vitrine écologique.
Il ne répond à aucune exigence et ne présente aucun intérêt pour quiconque.
Les performances, les capacités, l’utilisation, la sécurité, les couts, l’entretien et l’intérêt pour l’usager laissent à désirer.
On peut penser qu’avec le temps, les progrès technologiques sauront gommer tous ces soucis.
Mais c’est peu probable pour des raisons mécaniques évidentes.
Si l’on souhaite augmenter cette autonomie, il faut augmenter la taille et le poids des batteries, et donc la puissance de la mécanique et donc sa consommation…
On tourne en rond.
Une voiture électrique qui présente une bonne autonomie (environ 500km) ne peut l’assurer qu’en cycle mixte. Car le moteur électrique consomme à l’accélération et régénère (faiblement) à la décélération.
Sur autoroute, là où le moteur consomme en permanence les autonomies s’effondrent de l’ordre de 40%…
Un avion (comme un bateau d’ailleurs) utilise son système de propulsion en permanence, et consomme donc son énergie en permanence, la phase de régénération n’existe pas.
On pourrait éventuellement considérer qu’en descente l’avion pourrait régénérer, mais ces phases sont de trop courtes durées pour être considérées.
Enfin on pourrait également soulever la chute de l’autonomie par des températures froides, des conditions qui sont quasiment omniprésente en vol…
Un système de réchauffage de batterie pourrait palier à ce problème, mais cela augmenterait une fois de plus le poids, et donc la consommation…
Définitivement, la propulsion électrique n’est pas adaptée aux avions.
Il faudrait disposer de batterie aux capacités exceptionnelles, d’une bien plus grande capacité, 20 fois supérieure à minima pour une même masse, et cette technologie n’existe malheureusement pas.
L’avenir est peut-être dans l’hydrogène…